L’annonce en fanfare du changement de statut juridique de l’animal dans le code civil pourrait presque nous faire croire qu’il s’agit d’une avancée décisive en ce qui concerne la condition animale et que cette mesure, votée par l’Assemblée nationale mardi soir après moult débats, devrait entraîner des modifications de taille dans la façon dont sont traités actuellement les animaux…
On se calme. Passer de « bien meuble » à « être vivant doué de sensibilité » est certes un progrès. Mais en l’occurrence, ce ne sont que des mots qui ont fort peu de chances d’avoir quelque impact sur la suite des événements. Soyons clairs : il s’agit essentiellement d’une « modernisation et d’une simplification du droit », visant à harmoniser code pénal, code rural et code civil, les deux premiers reconnaissant aux animaux leur état d’êtres sensibles. Mais si les textes existant n’ont pas même suffi jusqu’à présent à éradiquer des pratiques comme la corrida, certains types de chasse, l’élevage industriel, l’abattage sans étourdissement, il ne faut pas compter sur un changement de formule dans le code civil pour mettre en route une révolution (à ce sujet voir l’article de Libération).
Il s’agit là en somme de l’arbre qui cache la forêt des inerties en matière de protection des animaux. Le gouvernement a-t-il espéré « calmer » de cette façon les associations de protection animale qui demandaient à cor et à cri le changement ? C’est possible, auquel cas c’est raté, même si certaines, soucieuses de ne pas se mettre les puissants à dos, pourraient s’en contenter. Car, ne soyons pas naïfs, rien de ce qui est réellement à proscrire n’est remis en question. Les lobbys des « utilisateurs d’animaux », comme ils se désignent eux-mêmes, veillent au grain. Ils sont puissants et aucun des gouvernements qui se sont succédé n’a voulu s’en faire des ennemis. Toutes les pratiques cruelles, exemples criants de violence infligées aux animaux, n’ont jamais été remises en question. Il faudra à la cause animale de solides arguments pour arriver à faire plier des politiques majoritairement frileux et qui ne tiennent pas à égratigner leur carrière pour sauver des non-humains qui ne votent même pas…
Josée Barnérias
Image : 30 millions d’amis