Fourrières : la petite bête qui monte…

LG Euthas

En France, il existe ce que l’on appelle des services fourrière. Chaque commune, y compris les plus petites, est légalement tenue d’en posséder un. Evidemment, il faut des infrastructures, ce qui représente un coût en locaux, en personnel et en fonctionnement. C’est pourquoi lesdites communes choisissent souvent de déléguer ce service à des prestataires qui peuvent être des associations de protection animale gestionnaires d’un refuge ou encore de vrais professionnels qui sont sur le pont sept jours sur sept et 24 heures sur 24, qui possèdent des véhicules grillagés, et tout un assortiment d’outils qui vont du lecteur de puce électronique à la seringue hypodermique en passant par la trappe à chats, et aussi des locaux agréés avec box, cages, système efficace d’écoulement des eaux usées, etc., du genre de la SACPA (Chenil Service). Une troisième solution existe également : les fourrières intercommunales, autonomes et gérées par une communauté de communes.

Aïe ! La photo ci-dessus donne des fourrières une image plutôt défavorable… mais on ne sait rien du lieu, du pays où la photo a été prise, ni non plus de la date à laquelle elle a été prise. Pour ne vexer personne, on dira que c’est une photo d’archives

Ce sont les contribuables qui paient le service fourrière, ce qui revient, selon les communes, à  une somme oscillant entre 0,50 euro et un euro par an et par habitant. Les communes qui paient plus d’un euro peuvent être considérées comme infiniment progressistes en matière de gestion des animaux dans la ville.

Le rôle de ces services est de capturer tous les animaux errants qu’on lui indique, principalement les carnivores domestiques, chiens, chats, et quelques NAC (nouveaux animaux de compagnie), et de rechercher leur propriétaire s’il y a lieu. Après quoi, au-delà d’un délai légal d’une dizaine de jours, ils sont censés soit confier les animaux à une structure qui leur trouvera des adoptants, soit faire procéder à leur euthanasie. Comme nous l’avons dit, toute commune est tenue de posséder un service fourrière. Mais seulement 60 % satisfait à cette obligation. Quant au 40 % restant, on leslaisse tranquille. Après tout, il n’y a pas le feu. Il ne s’agit que d’animaux.

Une fourrière n’est pas un refuge, puisque le but de ces structures n’est pas le sauvetage des animaux, mais la tranquillité et la sauvegarde des populations humaines. On n’y fait pas dans le sentimental, mais dans le sanitaire. On nettoie les espaces publics des parasites qui y traînent. Certaines fourrières cependant, sans être répertoriées dans la rubrique « amis des bêtes », font leur boulot correctement, sans brutalité, voire peut-être parfois avec bienveillance et tentent même, grâce à la mise en place d’un partenariat avec les associations, de placer le plus possible d’orphelins, leur permettant ainsi d’échapper à la piqûre létale.

D’après les estimations de La Griffe, entre 250.000 et 300.000 chats, plusieurs milliers de chiens sont mis à mort chaque année sur le territoire français dans les fourrières et les refuges-fourrières qui n’arrivent plus à endiguer le flot des abandonnés.

Tous ces animaux, s’ils n’étaient pas récupérés, traîneraient sur la voie publique et se reproduiraient sans le moindre scrupule, ils seraient probablement dégommés par des riverains excédés, au fusil de chasse, au poison, au collet (cela se rencontre tout de même de temps en temps) et grâce à tout autre moyen de destruction massive ou artisanale. Tout cela ferait désordre. Les fourrières, aujourd’hui, sont des structures absolument nécessaires si l’on veut avoir la paix, voilà pourquoi des professionnels un peu visionnaires se sont emparés du créneau, qui est florissant actuellement. Le métier d’agent de fourrière est en plein développement. Il y a, c’est sûr, des vrais débouchés. On y adore les mecs un peu machos, qui adorent tenir tête à des molosses agressifs et les choper au lasso, des filles qui aiment bien faire comme les mecs. Ne soyons pas médisants. Il existe aussi sans doute des gens qui font ce métier pour… rendre service, et parce qu’ils aiment les bêtes, un peu à la manière des toreros ou des chasseurs.

Oui, les fourrières sont un mal nécessaire, parce qu’il y a de plus en plus d’abandons. Les politiques se sont-ils dit un jour que l’on pourrait faire économiser un peu d’argent au contribuable si l’on éduquait les populations à ne pas laisser se reproduire leurs animaux, à ne pas les abandonner et surtout à ne pas en prendre à la maison si c’est seulement pour satisfaire un caprice ? Manifestement, non. Ils ne se sont jamais dit ça. Les animaux se multiplient, les fourrières en font autant.

Ce qui est important c’est de savoir comment, alors que les fourrières ont de plus en plus de boulot, elles pourraient coûter moins cher. On a trouvé la solution. On met en place ce que l’on appelle un groupement de commande. Un certain nombre de communes choisissent un prestataire de service et lui confient la tâche de récupérer les animaux errants sur leur territoire. Il faut toutefois signaler que la stérilisation des chats errants est en option, ce qui signifie que les communes doivent débourser davantage d’argent pour y avoir accès, ce que, bien entendu, très peu font. Que les chats se démerdent ! Ils n’ont qu’à essayer la méthode Ogino qui dans le temps, a fait ses preuves. Mais les chats sont moins intelligents que nous, ils n’ont pas encore très bien lu le mode d’emploi de la méthode Ogino, alors ils continuent de faire des petits. Et le pire, c’est que, eux, ils n’ont pas besoin de traitements hormonaux pour avoir des triplés, des quadruplés et autres séries multiples de deux. Ils sont partis pour repeupler le monde des chats et ils sont plutôt efficaces.

Seulement voilà, eux non plus ils n’ont pas compris qu’à partir d’un certain moment, ça coince. Plus assez de bouffe, plus assez de place. Ils se retrouvent au chômage, sans domicile, à faire les poubelles pour trouver de quoi survivre, à s’abriter de la bise polaire, l’hiver, dans de vieux cartons oubliés sur un coin de trottoir, dans es hangars délabrés, des garages collectifs (à cause de la chaleur dispensée par les moteurs des voitures). Et c’est là que la fourrière arrive… Finis les soucis quotidiens, adieu la vie, adieu l’amour ! Quand ce n’est pas la fourrière (nous avons écrit plus haut que s
eules 60 % des communes y avaient recours), c’est carrément l’entreprise de dératisation qui se charge du boulot. Eux aussi, ce sont de vrais pros.

Les politiques ont une gestion désastreuse des animaux qui vivent dans leurs villes ou leurs villages, c’est bien connu. Entre l’éradication des pigeons, sous des prétextes fallacieux (ils seraient censés véhiculer des tas de maladies encore plus horribles que la peste), les tentatives de massacre des corbeaux, qui font partie des intelligences remarquables de cette planète (c’est pourquoi ils donnent à leurs ennemis du fil à retordre), des chiens maltraités que l’on feint de ne pas voir, des chats que l’on oublie un temps, les laissant se reproduire librement, pour ensuite procéder à des razzia massives, ils voudraient nous faire croire que les agents de fourrière sont des chevaliers blancs juste destinés à mettre un peu d’ordre dans le chaos bestial.

Sauf que ce n’est pas tout à fait vrai. C’est une vison rassurante, certes, mais elle ne correspond pas tout à fait à la réalité (notez que nous disons « pas tout à fait »). La réalité c’est que 99 politiques sur cent n’ont rien compris. Que toutes les fourrières du monde ne règleront jamais le problème de la surpopulation des animaux dits de « compagnie », mais elles règleront en revanche le problème de leur chiffre d’affaires. Qu’il y aura toujours des gens, et de plus en plus, pour faire contrepoids à tous les abrutis qui abandonnent, maltraitent et s’en fichent, pour être choqués par la gestion expéditive des animaux qui pourraient être pour de bon nos compagnons, si tout à coup on ne faisait en sorte de les présenter comme nos ennemis : funeste vermine qui pisse et fait caca, qui héberge des puces et autres cancers de l’imagination.

Non, les politiques n’ont rien compris. Il va falloir leur expliquer. Les municipales arrivent, cela devrait pouvoir faciliter le dialogue…

Josée Barnérias