Les convulsions
de la viande
Laviande saigne de partout, ces temps-ci , se débat, convulse… La viande est mal en point.
? « Inquiétude » des éleveurs de bovins exprimée lors du congrès de la Fédération nationale bovine, à Guéret, dans la Creuse…
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Toujours à Guéret, lors de ce même congrès, expulsion, par les nervis de la FDSEA, d’Aurore Lenoir, coordinatrice du collectif NARG, qui avait eu la candeur de venir sur place, toute seule, pour distribuer quelques tracts contre le projet d’abattoir rituel soutenu par les élus locaux et, en principe, rejeté par un certain nombre d’éleveurs locaux…
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Salon de l’agriculture, qui fêtera en 2013 son cinquantenaire, manifestation bien mal nommée puisqu’en fait d’agriculture, c’est essentiellement, là encore, d’élevage qu’il s’agit…
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Politique agricole commune, soutenue par le gouvernement Hollande (par tous les gouvernements d’ailleurs), qui va continuer à arroser les élevages intensifs avec nos impôts, au lieu d’aider les maraîchers bio qui accepteraient sans barguigner un petit coup de pouce…
Et au milieu de tout ça, un bouquin, No steak, rédigé par une « star » du petit écran, le journaliste et grand reporter Aymeric Caron, qui raconte avec force arguments sa vie de végétarien.
Et enfin, le sauvetage récent de Diva, la vache salers et son petit veau à naître initialement condamnée à un voyage en Espagne direction l’abattoir, grâce aux efforts conjugués de La Griffe et l’Arche de Noé, une petite association de Dordogne, aidées par l’OABA…
Et, j’oubliais : rififi dans les lasagnes de Findusdans lesquelles on a décelé de la viande de cheval, alors qu’elles n’étaient censées contenir que de la viande de b?uf…
« L’élevage » de la viande
La viande… Tout un programme ! On a du mal à faire le point parmi toutes ces informations qui se croisent, empiètent les unes sur les autres et se télescopent. Jeudi, 7 février, à 10 heures sur France Inter, l’émission Service public était consacrée au sujet. Les invités, Aymeric Caron et son bouquin, et puis René Laporte, ingénieur agronome, et Jean-Michel Lecerf, chef du service nutrition de l’Institut Pasteur. Il s’agissait de débattre sur le thème « Faut-il en manger ou pas ? »ou bien « Peut-on en manger sans risques pour sa santé ? »ou encore « Peut-on ne pas en manger sans risques pour sa santé ? ». Tout au long de l’émission, l’animateur,
Guillaume Erner, n’a cessé d’évoquer « l’élevage de la viande ». Àchaque fois, je trépignais. Mais bon sang, me disais-je, comment un journaliste peut-il être aussi stupide ? On n’élève pas la viande, on élève les animaux (on peut aussi élever des gosses…). On produit de la viande, c’est un peu différent, non ? Enfin, le lapsus était révélateur. On peut le lire de la façon suivante : à la place des animaux destinés à la boucherie, ce ne sont pas des animaux que l’on voit, mais déjà de la viande. Un peu comme, à l’entrée de Ravensbrückou d’Auschwitz, les matons nazis voyaient des cadavres carbonisés à la place des femmes, des hommes et des enfants. Je vous entends déjà hurler : comment ose-t-elle comparer des zêtres zhumains avec des zanimaux ? Parce que le regard que les bourreaux portent sur les victimes qu’ils vont assassiner est rigoureusement le même que celui que nous portons aujourd’hui sur les bêtes que nous « utilisons » pour leur prendre leur chair, leur peau, leur vie. Qu’on le veuille ou non ! C’est un regard de dénégation, un regard aveugle. Un regard sur lequel on a posé un voile opaque, afin de ne pas avoir à contempler l’autre, le semblable, le même et sa détresse… Or, les animaux sont, à bien des égards, nos semblables… Ah, que cela est dur à entendre aux oreilles de l’anthropocentriste moyen !
Sauver les races !
Aymeric Caron explique cela, dans son livre : il y a eu, il y a fort longtemps, des périodes pendant lesquelles la chasse était indispensable à l’homme, même si la consommation des animaux n’a pas toujours été systématique. Il y a eu des périodes de froid intense qui nécessitaient que l’on se couvrît de peaux de bêtes… Rien de tel aujourd’hui. On peut vivre sans tuer, sans massacrer ces animaux qui nous ressemblent tant. Qui comme nous souffrent, physiquement et psychologiquement, de ce qu’on leur fait endurer. La viande est un crime, c’est certain. Il n’y a pas à discuter là-dessus. Au mieux, ce que l’on peut faire c’est, tout en reconnaissant qu’il s’agit d’un crime, refuser, puisque c’est un crime légal, d’en tenir compte… C’est (encore) notre droit le plus strict. Mais que l’on arrête avec les fables qui consistent à nous faire prendre les vessies de porc pour des lanternes qui éclaireraient notre futur ! Que l’on cesse de nous seriner que sans la chair de l’autre, sans son lait, sans sa peau, point de salut ! L’un des arguments les plus débiles qui nous est servi est une sorte d’argutie amphigourique qui consiste à prétendre que, grâce aux élevages d’animaux de boucherie, on préserve des races ! Je me souviens d’une telle discussion avec l’un de mes anciens collègues, plein de bonne foi, à propos des chevaux lourds. « Mais, tentait-il, héroïque, de m’expliquer, si on ne les élevait pas pour la boucherie, il n’y en aurait plus ! » Je ne me donnerai même pas la peine de démonter cet exemple hurlant de dévoiement du raisonnement, de tautologie digne d’un imbécile diplômé. Mon collègue n’en était pas un. Quelque temps plus tard, il est revenu me voir pour me dire que son point de vue était totalement erroné, et que j’avais raison…
Combien d’années, de décennies, de siècles, faudra-t-il encore avoir raison tout en rasant les murs pour ne pas s’entendre dire, parfois de manière fort peu aimable, que l’on a tort ?
Manif le 3 mars
La viande. Ce sera, je crois, l’affaire du siècle. Je l’espère, en tout cas. On a beau tourner le problème dans tous les sens, aux yeux de qui prétend soutenir la cause animale, les droits des animaux, de plus en plus, la consommation de viande devient indéfendable. Ou alors, on est un fieffé hypocrite. Car que fait-on des cinquante ou soixante milliards d’animaux (sans compter les animaux marins) tués et consommés chaque année dans le monde, souvent dans des conditions atroces ? Si l’on continue à consommer leur chair, peut-on croire en toute bonne foi qu’il va être facile de réduire leur nombre, d’établir des tickets de rationnement pour contrôler que l’on n’en mange qu’une fois par semaine ou par mois, pas davantage ? Et à quoi servirait-il, je vous le demande, d’en consommer une fois par semaine ou par mois ? On dispose largement de quoi se sustenter et se faire plaisir en se nourrissant sans cela. Peut-on croire que leur mort un jour sera douce ? Un animal condamné, on en a déjà parlé plus haut, est regardé non comme un être vivant, mais comme un futur cadavre. Et il y a un phénomène que les psy connaissent bien chez les bourreaux : pour se déculpabiliser de l’acte que l’on s’apprête à accomplir, il suffit de s’auto-persuader que l’autre, en face, est mauvais, sale, moche, stupide, et que c’est lui qui est coupable d’être tout cela, et pas soi-même de le détruire… Les chasseurs en sont un exemple, qui font des « nuisibles »(encore une légende toxique !) des individus à abattre, voire à torturer si l’on en a l’opportunité, de toutes les façons possibles, ou encore certains tueurs dans les abattoirs qui se rendent coupables de violences inouïes sur les animaux qu’on leur amène (il faut lire le bouquin de Jean-Luc Daub, Ces bêtes qu’on abat, pour en prendre vraiment conscience)… On pourrait multiplier à l’infini ces exemples de déni de l’autre dont les animaux sont les victimes muettes et impuissantes. Allons-nous encore longtemps tolérer cela ? Je n’évoquerai même pas les conséquences catastrophiques de la production de viande sur l’environnement, il y aurait beaucoup à dire, mais ce sera pour une autre fois…
Pend
ant les cinquante dernières années, souligne Aymeric Caron, la consommation mondiale de viande a quadruplé, la consommation de lait a été multipliée par dix… Sait-on ce que cela implique ? L’auteur n’est ni polémique, ni militant, il se contente de se dire que, quoi qu’il en soit, on ne va pas pouvoir continuer comme cela bien longtemps. Que l’abolition de la viande viendra, quoi que l’on fasse. Moi, ce qui me gêne un peu là-dedans , c’est que c’est un bon prétexte pour ne rien faire. Cela ne correspond pas à ma nature impatiente, ni à ma détestation de l’injustice.
Moi, je voudrais que ce soit tout de suite que l’on ferme les abattoirs !
À ce propos, une grande manif est organisée à Paris le 3 mars contre les élevages industriels…
Viande de chien, d’autruche…
Et pas la peine de me dire qu’il n’y a que quelques espèces qui, finalement, sont concernées ! Elles le sont toutes ou à peu près. Les interdits sur le meurtre de certains animaux ne sont pas universels, loin s’en faut. En 1940, on trouvait encore des boucheries canines en Allemagne. En France, elles ont existé jusqu’au milieu du XIXesiècle. La Chine et l’Extrême Orient sont connus pour leur goût de la chair des chats et des chiens, bien meilleure lorsqu’ils ont été longuement battus avant une mort que l’on peut, vu d’ici, considérer comme une délivrance.
C’est très tendance : au restau, blasés que l’on est devant la sempiternelle entrecôte ou le petit salé aux lentilles, on n’hésite pas à oser la viande d’autruche, de requin, le saucisson d’âne, pensant montrer ainsi sa belle ouverture d’esprit, son âme d’aventurier… Tout ce que l’on montre, en fait, c’est sa docilité de consommateur idiot…
Il faut lire le bouquin d’Aymeric Caron, non que je sois prête à en faire ma bible, mon livre de chevet, mon bréviaire, mais parce qu’il résume bien toute la problématique de la viande, parce qu’il est complètement crédible lorsqu’il fait l’inventaire des bienfaits des régimes végétariens ; parce qu’il tord le cou aux légendes véhiculées par des nutritionnistes bien mal informés ; parce qu’il sait amener non seulement les chiffres qui tuent, mais aussi les anecdotes qui réveillent, les digressions qui réjouissent. Il se défend par ailleurs de faire du prosélytisme, j'avoue que cette prévention me gêne un peu. Je n’aimerais pas penser qu’il n’a comme seule préoccupation que de surfer sur la vague des best-sellers tout en amortissant ses succulents repas dans les restos VG gastronomiques du monde entier dont certains, c’est à n’en pas douter, sont aussi goûteux et coûteux que nos traditionnels étoilés.
En tout cas, je le conseille (le bouquin) à ceux qui hésitent, tout en sachant qu’ils ne sont pas très « casher »avec leurs convictions, à sauter le pas, ceux qui ont du mal à rompre définitivement avec leur steak frites… No steak pourrait, je pense, les aider efficacement.
La viande, ce sont les animaux qui nous la servent à leur corps défendant. Il serait grand temps d’ouvrir les yeux, de se dégraisser les neurones pour enfin y renoncer définitivement. Et tant pis pour nos habitudes, nos croyances, nos mythes, nos mensonges, tout ce que d’aucuns nomment « culture » et qui n’a de culture que le « c » de connerie. Il y a fort à penser que l’on y gagnerait en intelligence et en humanité.
Josée Barnérias
Heureusement, il y a Findus !
C‘est tombé comme un cheveu sur la soupe : l’enseigne Findus aurait distribué des lasagnes certifiées à la viande de b?uf, alors qu’il a été établi qu’elles contenaient aussi… de la viande de cheval. On cherche activement le ou les coupables. Serait-ce la société
Spanghero qui a fourni la viande (il faudra un jour établir la relation qui existe entre la viande et le rugby – Charal… Chabal, hum… – qui doit passer par le muscle gorgé de sang jeune et frais, par la virilité carnassière, etc.) ou bien serait-ce les abattoirs roumains d’où provenait cette viande ? On peut au passage douter de l’éthique des Spanghero et autres Findus lorsqu’on sait comment sont traités les chevaux en Roumanie. Mais pourquoi un tel émoi ? En France aussi, on achève bien les chevaux ! Les horribles abattoirs de Vaugirard, c’est du passé, mais l’on tue chaque année tout de même, dans le pays des Droits de l’homme, entre 17.000 et 18.000 équidés… C’est parce que l’on craint que, dans la viande incriminée, se soient glissées quelques bactéries de trichinellose, ce qui peut arriver dans la chair de cheval et qui n’est pas excellent pour la santé des hippophages. Il ne faut peut-être pas dramatiser : jamais les chevaux ne nous feront autant de mal que nous leur en avons fait et leur en ferons encore !
Merci pour les info.
Vous m´avez aidé beaucoup.
Je recommande cet article, il m´a aide beaucoup.Ormazd Berthiaume