2012 encore
plus fort que 2011 !
La première assemblée générale de La Griffe, le 15 janvier 2011, au bout de quatre mois d'existence officielle, ressemblait un peu à une réunion Tupperware. Nous étions quinze sur les vingt-sept adhérents que comptait alors l'association. Et la réunion se déroulait dans le petit séjour de l'une d'entre nous. Une réunion pionnière en quelque sorte.
Cette fois-ci, pour la seconde AG, on était plus « pro ». La municipalité de Clermont-Ferrand nous avait prêté une vraie salle, dans laquelle se trouvaient de vraies chaises. Une quarantaine d’adhérents, à la louche, chaleureux et enthousiastes. Certains venus de très loin, comme Catherine, qui habite aux confins du département de l'Allier, ou Nicole, qui vit sur les hauteurs enneigées, quelque part dans le massif du Sancy. Cette « descente » à la ville en dit long sur leur motivation, et je profite de ces lignes pour les remercier chaleureusement. Puisse La Griffe jamais ne les décevoir et, avec elles et d?autres comme elles, finir par déplacer les montagnes d'indifférence et de mauvais foi qui nous cernent !
On attendait une élue clermontoise. La source officielle nous avait annoncé la présence d'Odile Vignal, adjointe à l'écologie urbaine et au développement durable à la municipalité de Clermont-Ferrand. Elle n'est pas venue. Mais on ne lui en a pas voulu. Quelques semaines plus tôt, elle nous avait reçues et écoutées avec attention. C'est sans doute grâce à son intervention que Demain Clermont-Ferrand a publié, ce mois-ci, un encadré sur la nécessité de faire stériliser les chats et ainsi contribuer à maîtriser leur nombre.
Une assemblée générale, c'est souvent assommant. On a à y subir les discours mornes d'orateurs inaudibles, quelquefois pendant des heures? C'est pourquoi on ne remerciera jamais assez ceux qui font l'effort de se déplacer pour y assister. Nous, on avait essayé d'être brefs et précis. De causer clairement en ar-ti-cu-lant (rien de pire que l'effort d'attention auquel vous contraignent les chuchoteurs et autres bouffeurs de syllabes !). On a commencé comme il se doit par les remerciements, on a embrayé sur le rapport d'activités puis sur le rapport financier après, toutefois, un petit discours, que l'on trouvera plus bas, sur la condition animale aujourd'hui. Vaste et triste sujet.
En un mot, on a essayé d'aller droit au but : ce qu'on a fait, combien ça a coûté, ce qu'on fera, ou du moins ce que l'on s'efforcera de faire. Finalement, pour une première année, on ne s'est pas trop mal débrouillés. Mais on a encore des tas de choses à apprendre. C'est qu'aujourd'hui, le cheminement d'une association ne supporte pas l'à-peu-près. Bénévolat ne doit pas signifier amateurisme. Nous devons tendre vers une forme plus ou moins aiguë de professionnalisme.
Cette année, on continuera dans le sens d'une gestion rigoureuse et précise, mais sans mégoter sur les soins à apporter aux animaux malheureux, malades ou blessés qui croiseront notre route. Nous parviendrons à en sauver quelques-uns. Une goutte d'eau dans un océan de souffrances… Mais comme le dit le proverbe, ce sont les petites gouttes d'eau qui font les grandes rivières (ou quelque chose comme ça…)
Il nous faudra aussi nous rapprocher des associations qui vont dans le même sens que nous, parce qu'il est important d'unir nos forces. Nous irons encore visiter des élus, le plus possible. Les élections approchent, c'est le moment de les questionner (de les cuisiner?) sur leurs positions respectives.
Nous sommes submergés de demandes en ce qui concerne les chats des rues. Mais nous ne pouvons intervenir qu'a minima, selon ce que nous permettent nos petits moyens. En revanche, nous comptons bien ?uvrer en amont. Nous préparons un dossier sur le sujet qui s'accompagnera d'une affichette. Laquelle affichette sera adressée au maximum de communes, sera placée partout où on le pourra. Nous comptons sur nos adhérents pour en recouvrir les murs et autres supports de leur commune, de leur lieu de travail, de leur maison…
Une date importante se profile : le 24 mars, à Nîmes, aura lieu une grande manifestation unitaire (voir ci-dessous) à laquelle La Griffe participera. Si vous désirez vous y rendre, faites-le savoir?
Et maintenant, au boulot !
Josée Barnérias
Assemblée générale de La Griffe, 21 janvier 2012 span>
Le discours de la présidente
En ce moment même, il y a des centaines de millions d?animaux, de par le monde, qui souffrent et qui meurent à cause de nous. En ce moment aussi se déroulent, quelque part en France, des manifestations microscopiques, dont les médias ne font généralement pas leur miel, dont les politiques ne se préoccupent guère, pour protester contre l'exploitation, le martyre et la mise à mort cruelle des bêtes. En ce moment même, à Émagny, dans le département du Doubs, se déroule une manifestation unitaire pour demander la fermeture d'un élevage de visons où plusieurs infractions ont été relevées, et pour empêcher l'implantation prochaine d'une même sorte d'élevage, dans la commune voisine, Moncley.
Depuis une dizaine d'années, le combat pour la cause animale a pris un essor extraordinaire, dont nous devrions ici nous réjouir. Mais, dans le même temps, la condition animale est de plus en plus fragilisée, de plus en plus précaire, soumise à notre seul profit, nos seuls caprices.
Chaque année dans le monde, 60 milliards d'animaux terrestres sont élevés et abattus pour leur chair dans des conditions le plus souvent atroces. Davantage encore d'animaux marins sont arrachés à leur milieu naturel de la manière la plus violente qui soit. Chaque année, dans nos belles campagnes françaises, les chasseurs blessent et tuent 30 millions d'animaux dont une grande partie ?comble de l'aberration- sont des animaux d'élevage. Chaque année encore, nous, peuple de France qui, dit-on, adorons nos animaux de compagnie, en abandonnons des centaines de milliers. Ceux-ci seront promis au mieux à de longs mois d'attente dans un refuge, au pire à l'errance interminable et à la mort précoce, comme des millions de chats, ici, chez nous, ou encore à la piqûre létale distribuée à la chaîne, parfois de façon extrêmement cruelle, dans les fourrières surpeuplées.
Les consciences s'éveillent. D'un peu partout montent les protestations. Contre ces horreurs anachroniques que sont la corrida et la chasse à courre, et contre d'autres pratiques, tout aussi révoltantes : gavage, industrie de la fourrure, élevage industriel, abattage sans étourdissement, expérimentation animale, douloureuse, obsolète et inutile. Des savants, des philosophes et bien d'autres sommités de la pensée contemporaine s'interrogent. Avons-nous le droit de traiter les animaux comme nous le faisons ? Quels que soient les courants, les mouvements, les écoles, la réponse est le plus souvent sans appel. Et la réponse est Non.
Non, nous n'avons pas le droit de martyriser, de réduire en esclavage ceux qui ont avec nous un lien évident de parenté. Les animaux nous ressemblent beaucoup plus qu'on ne veut l'admettre. Intelligence, pensée, émotions sont aussi leur lot. Comme nous, ils connaissent la souffrance physique et psychologique. Mais l'humanité ne veut pas voir cela, pas le savoir.
Je vous mets au défi de trouver, dans les discours et les déclarations des responsables politiques le mot « animal ».Environnement, nature, biodiversité, espèces, oui. Mais animal, non. Y aura-t-il un jour un politique assez courageux pour dire« Assez ! » ? Comme l'avait fait Alain Bombard (*), qui a été remercié de son zèle en étant évincé de son poste de secrétaire d'État auprès du ministre de l'Environnement. On ne s'attaque pas impunément aux chasseurs, fussent-ils à courre, dans notre pays.
C'est que l'animal en tant que sujet vivant, conscient, actif, sensible, n'existe tout simplement pas dans les schémas mentaux officiels. Pourquoi veut-on ignorer à ce point les bêtes ? Pourquoi est-on dans un déni aussi violent de leur souffrance?
Peut-être parce que ce serait trop dur de se dire que nous nous comportons comme des brutes. Parce que les croyances, les coutumes, les a priori ont la vie dure, et surtout parce qu'il y a des intérêts énormes en jeu. Lobbies de l'agro-alimentaire, de la chasse, de la corrida?Et bien d'autres
Les animaux sont tous nos esclaves. Et un esclave est transparent. Il n'a ni nom ni existence. Il est là pour subir . Au nom de quoi, si ce n'est de la loi du plus fort ? Nous ne pouvons plus continuer ainsi. Il y a grande urgence à changer. Il en va de notre dignité d'hommes et de femmes. Du sens que nous donnons au mot« humanité ».
Les principaux ennemis des animaux, ce sont la mauvaise foi, l'ignorance et le déni. Par « animaux », nous désignons surtout les vertébrés? Mais les frontières sont loin d'être étanches. Nous savons aujourd'hui avec certitude qu'un animal comme le poulpe est d'une intelligence étonnante et qu'il est accessible à bien des émotions. Nous ne voyons en lui qu'une sorte de monstre qui ne cesse d'être laid que lorsqu'il est dans notre assiette. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises…
Peut-il y avoir d'humanité digne de ce nom, pacifiée, apaisée, solidaire, tant que notre attitude envers les bêtes restera alimentée par la peur, la haine et la cruauté, par la cupidité et le besoin de domination ? Moi, je ne le crois pas. Ils sont nombreux ceux qui veulent opposer le combat pour les bêtes et le combat pour les hommes. Comme si donner aux uns, c'était enlever aux autres. Ceux-là se trompent. Les animaux ne sont pas les ennemis des hommes, même si l'inverse n'est souvent que trop vrai.
Nous devrons un jour quitter nos oripeaux de tortionnaires, et être capables de regarder les bêtes dans les yeux. Un jour peut-être, nous cesserons de les faire souffrir et de les tuer, comme nous cesserons de nous entre-massacrer, de nous entre-déchirer. Nous fermerons les fermes à ours et à visons, les abattoirs et les fourrières. Nous ouvrirons les portes des cages et nous rangerons définitivement les fusils et les couteaux. Nous regarderons les derniers goril
les, les derniers tigres vivre libres parce que libérés de la peur qu'ils ont de nous.
Bien sûr c'est une utopie. Mais les utopies d'aujourd'hui, ce sont souvent les réalités de demain.
Josée Barnérias
(*) Il fut secrétaire d’État auprès du ministre de l’Environnement dans le premier gouvernement de Pierre Mauroy (22 mai–23juin1981). Il quitta le gouvernement à la suite de déclarations sur la chasse à courre qu’il souhaitait abolir. Il fut également député européen de 1981 à 1994.